L'ÉDITORIAL de Jacques Lavergne (Cliquez)


04 janvier 2025

L'Éditorial du 19 janvier 2025

« Tout ça pour ça ! »

Des milliers d’années où des humanités ont bégayé sur cette planète, tentant lentement, progressivement, souvent dans la douleur et les difficultés de tous ordres, de progresser, d’acquérir une vie meilleure, matériellement bien sûr mais aussi culturellement et spirituellement. Tout en peuplant toutes les parties de cette planète, même les plus inaccessibles, grâce à une volonté farouche, au prix d’efforts colossaux, de souffrances indescriptibles et de surprenantes adaptations génétiques.

Des centaines d’années consacrées à élaborer des civilisations de plus en plus complexes, mues par des règles, des traditions, des croyances, des valeurs, des techniques, toutes plus sophistiquées les unes que les autres au fil du temps. Des civilisations qui ont eu des côtés brillants intellectuellement, des fulgurances créatives, des avancées inventives indéniables ; mais aussi des faces sombres faites de colonisation, d’intolérance, de domination, d’exploitation, de violence.

Des dizaines d’années qui ont vu se produire une explosion technique, scientifique, médicale, mais aussi démographique. Une amélioration globale de la vie des hommes, ou du moins de ceux d’entre eux qui étaient nés sous la bonne latitude, avec la couleur de peau qui allait bien, qui acceptaient de jouer le jeu du système politique et économique dominant dans lequel ils vivaient. Mais pour une grande partie de l’Humanité, la vie était globalement meilleure sinon confortable. Assez en tout cas pour espérer que l’ensemble de ces bienfaits, réels ou supposés, s’étendraient à l’ensemble de la planète ; pour rêver que demain serait meilleur que hier et moins bon qu’après-demain.

Et puis, progressivement, lentement, trop lentement, la doute s’est insinué. A l’évidence, nous ne pouvions parvenir à ces lendemains prometteurs si l’on continuait à dégrader les conditions physiques qui avaient permis à la vie d’apparaitre et de se développer sur Terre. Si la violence entre les individus et les conflits armés entre Etats ne revenait pas à son niveau le plus bas. Si les disparités sociales, patrimoniales, économiques persistaient à demeurer aussi profondes. Si un sentiment d’appartenance à une même communauté - celle des « homo sapiens » – et donc la nécessaire solidarité entre ses membres, ne présidait pas à leurs rapports.

Nous étions à un instant où tout était possible, le meilleur comme le pire. Un moment qui nécessitait pour que le premier advienne que les « commandes » du Monde soient confiées à des femmes et hommes instruits, cultivés, puissamment cortiqués. Et capables de nous convaincre d’adopter les bonnes pratiques de nature à nous permettre de sauver ce qui pourrait encore l’être. Las, que croyez-vous qu’il se passât ? Ce furent les hommes violents, agressifs, sans culture ni valeurs élevées, pour qui la force constitue la qualité suprême, qui furent portés au pouvoir ou qui le prirent par la ruse, la violence, l’aide de technologies liberticides, le soutien de financiers voyous et intéressés. Et bien sûr en s’appuyant sur des masses bêlantes de populistes prêts à gober, à colporter n’importe quelles foutaises même les plus énormes, servies par ceux qui les manipulent sans vergogne. « Ceux qui peuvent vous faire croire en des absurdités pourront vous faire commettre des atrocités » Voltaire.

Nous y sommes. Désormais, malheur aux faibles, aux déracinés, aux pauvres, aux exclus, aux opposants, aux intellectuels, aux basanés, aux sexualités minoritaires, aux démocrates et plus globalement à ceux qui ne veulent pas s’abaisser à soutenir des thèses imbéciles et humainement avilissantes. Place aux Poutine, Trump, Musk, Maduro, Le Pen, Zuckerberg, Orban, XI, Bolsonaro, et leurs hélas innombrables pareils car la liste est loin d’être exhaustive. Sans oublier bien sûr les barbus fous de dieu.

L’Europe et quelques autres pays partageant les mêmes valeurs pourraient être un havre de paix, un refuge, un îlot de résistance et montrer de toutes autres directions et pratiques. Encore faudrait-il que leurs dirigeants fassent montre d’un peu moins de pusillanimité et d’un peu plus de courage politique. Et que leurs électeurs se dessillent, s’intéressent à ce qui se passe hors de leurs frontières, et s’adonnent au réalisme. Nous rentrons dans une phase complexe, délicate, voire dangereuse. Les choses vont aller très vite. L’alliance du populisme et de la manipulation, du pouvoir décomplexé et déshumanisé, de l’excellence technologique et de l’argent, pourrait bien produire un résultat explosif. L’âge de la régression nous guette, celui de la prédominance du crétin aussi !

Sommes-nous prêts ?

Jacques Lavergne / 19-01-25 / Radio web Esprit Occitanie


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