L'Éditorial du 4 janvier 2025
« L’Europe entre le marteau et l’enclume
L‘Europe a aujourd’hui impérativement besoin d’être forte et unie, ce que malheureusement elle n’est pas. Celui que l’on appelait son « moteur », le couple franco-allemand, est à l’arrêt depuis bien longtemps. Les différences d’approches sur moult problèmes entre les deux pays, les erreurs commises par leurs dirigeants – Scholz et Macron – qui en font aujourd’hui des responsables politiques sans force ni crédibilité, leurs économies à la peine, ont contribué à fragiliser voire à casser une mécanique qui avait fait ses preuves. Au surplus, certains pays, pas forcément les plus importants mais quand même, tels la Hongrie et son dirigeant populiste Orban ou la Slovaquie de Fico, jouent ouvertement la carte de la Russie.
Une Russie dirigée par un criminel de guerre dont l’armée massacre des civils, enlève des enfants, utilise des armes chimiques ou le viol comme arme de guerre, bombarde et détruit des villes entières et des installations de première nécessité au mépris des conventions internationales. Et fait massacrer des centaines de milliers de ses compatriotes. Un pays qui commence à ressentir durement les effets de cette guerre qu’il a lui-même déclenchée : les signes d’une brusque dégradation de la situation économique se multiplient. Les sanctions occidentales commencent à produire leurs effets. La stagflation menace, l’inflation est plus de 9 %, la hausse des prix est plus de deux fois ce qu’avait prévu le Kremlin. De ce fait la banque centrale a été contrainte d’augmenter son taux directeur à 21 %, et conséquemment les taux des banques frôlent les 30 % alors que le rouble plonge.
Est-ce pour autant suffisant pour que Poutine mette un terme aux hostilités ? Pas vraiment si l’on en croit un diplomate en poste en Europe de l’est, cité par le Canard Enchainé : « Tout comme Netanyahou à Gaza, Poutine n’a peut-être pas intérêt à une paix qui le mettrait, sur le plan intérieur, face aux conséquences de son « opération spéciale ». En particulier le nombre faramineux de morts ». Cette guerre qui sévit aux portes de l’Europe est peut-être loin de s’achever même si agresseur et agressé n’en peuvent plus. Ce criminel qui la menace représente toujours un risque sérieux et l’Europe pourrait bien se mordre les doigts de ses atermoiements, de son indolence et de son impuissance à armer l’Ukraine.
De l’autre côté de l’Atlantique, la situation bien que radicalement différente n’engendre pas non plus l’optimisme. L’élection d’un personnage aussi fantasque que Trump, irrationnel, n’écoutant ni ses conseillers ni personne si ce ne sont ses préjugés souvent douteux, introduit une multitude d’inconnues qui rendent l’avenir à tous niveaux plus qu’incertain, sinon inquiétant. Enfin si, il écoute quelqu’un, pour l’instant (et jusqu’à quand ?) mais il n’est pas certain (euphémisme !) que ce soit la meilleure des choses pour l’Europe : Musk. Lequel ne sera pas l’homme qui ne le modérera ni ne le mettra sur la voie de la sagesse, ou celle de la raison et de l’équilibre. Surtout dans la mesure où cet Elon Musk se révèle être un boute-feu de la pire espèce.
Il fait aujourd’hui le sale boulot pour le compte de Trump en ciblant, notamment grâce à son réseau social, de préférence les dirigeants-sociaux-démocrates, tel Olaf Scholz et le Président de la République fédéral d’allemagne, Frank-Walter Steinmeier qualifié de « tyran antidémocratique ». Ou le travailliste Keir Starmer, premier ministre britannique accusé d’avoir étouffé une vaste et sordide affaire de viols de mineures perpétrés par des gangs d’émigrés pakistanais ! Et surtout en menant une offensive antidémocratique et antieuropéenne d’une grande virulence, une tentative de déstabilisation et de dénigrement inédite à ce jour. Offensive qui se concrétise par exemple par des appels aux électeurs allemands à voter pour le parti d’extrême droite Alternative für Deutschland aux législatives du 23 février ; ou bien en réclamant de nouvelles élections au Royaume-Uni en offrant de financer certains partis populistes proches de la droite extrême. Mesdames Le Pen et Meloni doivent en frétiller d’aise. Poutine ne fait pas mieux.
Situation ahurissante qui voit un homme d’affaires, ne possédant même pas la nationalité américaine, prendre des initiatives politiques internationales qui ne sont ni plus ni moins que de l’ingérence grossière, avec la bénédiction du Président élu des Etats Unis, par ailleurs condamné par la justice pénale de son pays ! Au surplus un chef d’entreprise enrichi par les contrats publics et qui a financé l’élection de ce dernier à hauteur d’un quart de milliards de dollars. Bref le conflit d’intérêt est patent. Cet étrange attelage constitue une menace directe pour l’Union Européenne et pour les démocraties qui la composent. (Mais ils étaient invités par Macron à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame !)
Il est certainement temps de paraphraser Philippe le Hardi lorsqu’il interpellait son père, le roi de France Jean Le Bon : Europe, gardez à vous à l’est. Europe, gardez-vous à l’ouest !
Jacques Lavergne / 04-01-25 / Radio web Esprit Occitanie
'Éditorial du 24 décembre 2024
«Triste lassitude
Emmanuel Macron, malgré ses tentatives d’exister encore et de promouvoir des affidés, n’a plus la main depuis longtemps, son pouvoir politique se réduit comme peau de chagrin. A preuve, plusieurs défaites électorales dont il n’a tiré aucun enseignement, une dissolution aux conséquences encore incalculables mais à l’évidence catastrophiques, et le fait de s’être fait imposer successivement deux premiers ministres dont à l’évidence il ne voulait pas. Le crépuscule d’une fin de règne pour un homme qui se prend pour un génie, aujourd’hui incompris pense-t-il, et qui a échoué sur tout. Sauf malheureusement à affaiblir considérablement le pays et à achever de le ruiner financièrement. Mais que nous sommes condamnés à conserver à l’Elysée sauf à voir s’opposer dans une élection présidentielle anticipée la peste et le choléra, Mélenchon et Le Pen.
Contraint et forcé, le Président de la République s’est résigné à désigner François Bayrou pour occuper Matignon. Il aurait bien évident préféré nommer une femme ou un homme sur qui il aurait eu barre, afin de poursuivre à travers elle ou lui la désastreuse politique – notamment économique - qu’il a menée jusqu’à ces derniers mois. Ce qui démontre bien que, soit il n’a pas compris le message des urnes penchant sensiblement à gauche, soit il s’en moque estimant détenir la Vérité sur la piétaille incapable d’apprécier ses mérites et sa vision supérieure. Dans tous les cas, la démocratie est bafouée, le clan des abstentionnistes renforcé et l’instabilité politique devenue dangereusement chronique.
Nous avons donc un nouveau premier ministre, le quatrième en quelques mois. Certains font du neuf avec du vieux ; François Bayrou, lui, a choisi de carrément de faire du vieux avec du vieux. Au surplus en cédant aux oukases de Le Pen qui ne voulait pas entendre parler de certaines personnalités tel Xavier Bertrand, lequel l’a combattue sans faiblesse. Bref, le nouveau premier ministre fait du Barnier bis : on sait où cela a mené ce dernier. Les premiers pas de Bayrou dans ce poste éminent paraissent bien timides et déjà jalonnés de quelques erreurs de communication. Son équipe qui devait être marquée du sceau de l’ouverture et d’un élargissement de son socle politique, ne l’est en rien et ne le met nullement à l’abri de la censure. Ce n’est pas en s’appuyant sur ceux qui étaient et sont le problème que l’on parviendra à la solution permettant de sortir la France du fossé dans lequel elle est enlisée.
Surtout, une personnalité, quelque soit sa couleur politique, aussi déterminée voire brillante soit-elle, se heurtera toujours au problème que constitue une Assemblée divisée et de laquelle aucune majorité ne peut émerger. Et ce d’autant moins que les parlementaires s’arcboutent sur leurs positions étroites et sectaires, aucun ne voulant lâcher une parcelle de ses convictions ni faire la moindre concession sur quoique ce soit. Une Assemblée encore à l’abri d’une nouvelle dissolution pendant quelques mois. Si les représentants de certains pays savent nouer des alliances, même ponctuelles, et faire des concessions, des compromis, afin de faire avancer leur cause nationale, il est évident que nos moeurs politiques ne sont pas aussi évoluées.
Et que notre personnel politique comprend surtout de petits politiciens à courte vue, totalement déconnectés des réalités du pays et même de la Planète, au service d’appareils politiques étroits et dépassés, des élus qui sont tout sauf des Femmes et des Hommes d’État. La France n’est plus dirigée, ceux qui seraient en charge de le faire croient certainement que nous sommes sur un île, intouchables car bien à l’abri des vicissitudes d’un monde devenu violent, incertain, avec une guerre à nos portes. Cécité irresponsable que nous risquons de payer cher. Les Français le savent, le sentent, ils épargnent, les entreprises demeurent dans l’expectative différant les décisions essentielles. Cette conjoncture affaiblit la demande intérieure en ralentissant consommation et investissement, moteurs de la croissance. Nous sommes toujours sans budget, notre déficit public s’accroit, notre dette aussi qui dépasse les 3 300 milliards d’euros. La perte de confiance des investisseurs est évidente comme le montre la baisse de la note de la France par les agences de notation, conduisant à une augmentation du coût de la dette.
Voilà où nous a conduit la politique du Président Macron et des ses amis, lesquels s’accrochent au pouvoir contre vents et marées : François Bayrou et bon nombre de ses ministres en sont l’exemple. Ce vieux monde qui devait disparaître est là, tenant fermement les rênes du pouvoir : après nous avoir mené dans une impasse, ruiné et fait le lit des extrêmes, affaibli démocratie, finances et services publics, nos dirigeants continuent à jouer avec l’avenir des Français qui assistent à leur triste et stérile parade impuissants, fatigués, incrédules devant tant de suffisance et d’impudeur tranquille, peut-être résignés.
Jusqu’à quand ?
Jacques Lavergne / 24-12-24 / Radio web Esprit Occitanie
L'Éditorial du 19 octobre 2024
« TOUT BAIGNE…
Le sud de la France vient de connaître des épisodes de prélèvement considérables avec des cumuls pouvant atteindre localement 600 à 700 mm, dont environ 500 mm en moyenne sur quarante-huit heures. C'est exceptionnel. Ce qui l'est aussi c'est l'étendue des territoires touchés par le phénomène : trente-trois départements placés en vigilance orange pour des pluies et des inondations et six en vigilance rouge. En plus, dans certains départements de la moitié nord de la France, on attend entre 30 et 50 mm de prélèvement sur des sols déjà gorgés d'eau en raison du passage récent de la tempête Kirk.
Depuis quelques mois nous assistons à une recrudescence de ces phénomènes : voir par exemple les inondations exceptionnelles en vallée d'Aspe, ou la crue en Isère qui avait ravagé la Bérarde. La France n'est pas le seul pays touché, une partie de l'Europe centrale l'a été aussi. Rien d'étonnant à cela : comme le dise les spécialistes (lire l'entretien donné par le climatologue Aurélien Ribes à Audrey Garric du Monde), « cette série interpelle mais elle est cohérente avec le tableau clinique du changement climatique ». Ce dernier augmente les températures, de ce fait l'air contient davantage de vapeurs d'eau, d'où des épisodes de fortes, fréquentes et plus intenses. Il faut s'y préparer, les émissions de gaz à effet de serre émis par l'activité humaine entraîneront des épisodes de ce type, toujours plus violents.
Tout baigne…
Mais cela n'inquiète pas tout le monde, notamment le personnel politique français, singulièrement celui qui – même minoritaire – tente de gouverner aujourd'hui le pays. Plutôt que de se pencher sérieusement sur ces questions environnementales, Michel Barnier et son ministre de l'Intérieur se pavanent à Menton pour traiter de l'immigration et préparer une énième loi sur la question alors même que sur les 30 décrets d'application prévus par la loi immigration de 2023, seuls 8 ont été publiés . Sans oublier que, selon l'agence Frontex, les passages clandestins aux frontières de l'UE sont en baisse de 42% depuis janvier (les 3 pays les plus représentés parmi ces migrants irréguliers restent la Syrie, le Mali et l'Ukraine) .
Bref, on voit par là que nos politiciens sont plus préoccupés par les postures, les visions étriquées, les petits bricolages politiciens, les jeux d'appareils médiocres, que par l'avenir des Français, leur santé, leur sécurité, leur Avenir. Tant qu'à parler d'immigration, se sont-ils posés la question de savoir comment l'on fera face à un jour prochain au flux d'hommes et de femmes qui, chassés de chez eux par un changement climatique dont ils ne sont pas responsables, s'abriteront-ils pour survivre sur nos territoires ? Se sont-ils réunis sur le point de savoir qui fera tourner notre économie, travaillera dans nos entreprises, payera charges et retraites, lorsque la crise démographique qui nous touche aura déjà atteint des proportions insoutenables ?
Non, ils gèrent leur petite boutique partisane, suivant les vents plus ou moins dominants même s'ils sont porteurs d'odeurs nauséabondes et de solutions aussi frelatées qu'inefficaces.
Tout baigne on vous dit.
Jacques Lavergne / Esprit Occitanie / 19 octobre 2024
L'Éditorial du 09 octobre 2024
« PREHISTOIRE
Ce n’est pas pour me vanter, comme le disait le regretté Pierre Desproges, mais je viens de participer comme bénévole, et avec d’autres forts sympathiques camarades, au festival du film de préhistoire, Objectif Préhistoire, qui se tenait à Cabrerets dans le Lot. Là où se situe la très belle grotte ornée du Pech Merle, gérée et conservée par une Mairie qui a l’intelligence d’y consacrer des moyens importants (proportionnellement à sa taille) afin que ce bijou des temps très anciens puisse perdurer dans le meilleur état et que toutes et tous puissent venir la visiter, l’admirer et en tirer profit chacun à sa manière.
Au menu, des films documentaires de grande qualité (dont 18 en compétition), un jury d’experts et tout un aéropage de scientifiques aussi passionnants que passionnés. Pendant plus de deux jours, le public, nombreux, curieux et attentif, a baigné dans une ambiance faite de culture, d’intelligence, de savoir, de savoir faire, et grâce aux réalisateurs de l’indispensable faire savoir. Ce fut une parenthèse revigorante pour nos esprits bien malmenés par les temps qui courent. Un public qui n’était pas composé que de spécialistes ou d’intellectuels, loin s’en fallait, mais un public captivé, même si pour beaucoup non averti. Un public qui est reparti enchanté et vraisemblablement à l’horizon de pensée ainsi élargi.
Alors la préhistoire, allez-vous me dire, pourquoi faire ? Et bien justement, elle est fondamentale dans vos vies et notre réflexion, encore plus aujourd’hui. Au moment où ce monde soufre de multiples maux, où la planète est profondément dégradée par les humains, au moment où ceux-ci se multiplient tout en altérant gravement les conditions ayant jusqu’ici permis à la vie de prospérer, il est grand temps de se poser des questions et si possibles les bonnes. Il nous faut remettre dans une direction plus heureuse cette humanité en délire. Mais pour déterminer où elle doit aller, il est essentiel de savoir d’où elle vient. Et là, les leçons de la préhistoire sont essentielles, irremplaçables.
Nos prédécesseurs aux consciences définitivement mortes – Néandertaliens, Denisoviens, et autres homo heidelbergensis – peuvent nous aider à nous situer, à retrouver notre chemin, à nous diriger avec plus d’humilité et de sagesse. Car comme l’a écrit l’archéologue et chercheur au CNRS Ludovic Slimak dans son dernier ouvrage (Sapiens Nu chez Odile Jacob) « Notre inconscience de ce que nous sommes au monde est totale ». Nos racines, même profondes, même lointaines et peut-être surtout parce qu’elles le sont, peuvent s’avérer salutaires dans ce moment de doute et de brouillard. D’où l’importance des travaux des chercheurs dans le domaine préhistorique, archéologues aux multiples et savantes spécialités, capables d’user de techniques complexes, d’appareillages sophistiqués, travaillant en équipes pluridisciplinaires issues de tous les pays. Comme dans les temps anciens objets de leurs études, les frontières n’existent pas pour ces scientifiques.
Et pour une fois, et nous ne le regretterons pas, ce festival s’est ouvert et fermé sans qu’aucun de ces petits barons et marquises de la politique n’y viennent y parader et lasser le public par leurs discours creux et éculés. Par contre, ils eussent été bien avisés de venir se fondre discrètement dans l’assistance pour, avec elle, apprendre et réfléchir. Deux verbes qui, hélas, ne font pas partie de leur vocabulaire, sinon pour tous du moins pour une grande majorité d’entre eux. Lorsque l’on a en charge la gestion de l’avenir, mieux vaut posséder un appareil cognitif performant et intellectuellement bien nourri. Il n’est que de suivre la politique nationale voire internationale pour prendre conscience avec un certain abattement (pour ne pas dire un effroi) que bien peu de politiciens en sont dotés.
Il nous faudra donc faire confiance à la « société civile » qui paraît elle disposer de solides ressources. Ce festival Objectif Préhistoire et tant d’autres manifestations similaires en sont la preuve vivante. Vivement sa prochaine édition et grand merci à ses deux promoteurs et organisateurs, Clémentine Brandeis et Bertrand Defois, pour l’avoir relancé de si belle manière.
P.S. Ecouter sur Esprit Occitanie l’émission Cap e Cap qui lui a été dédiée…
Jacques Lavergne / Radio web Esprit Occitanie
L'Éditorial du 28 septembre 2024
« Caramba, encore raté
La grande affaire de cette fin d’année sera l’élaboration du budget de la France. Avec une double contrainte : le déficit du pays s’accroit dans des proportions inquiétantes ce qui n’est plus supportable à terme ; Bruxelles a déclenché à l’encontre de la France une procédure d’endettement excessif. En effet, voilà un demi siècle que l‘Etat n’arrive pas à équilibrer son budget. Mais les sept ans de politique économique du Président Macron ont considérablement aggravé la situation.
Jugez-en : 3 228 milliards de dettes représentant 112 % du PIB alors que les règles européennes en prévoyaient au maximum 60 % ; 52 milliards d’euros d’intérêts à régler en 2024, soit 12 % de notre budget et son deuxième poste. Nous empruntons à des taux de plus en plus élevés avec à présent une inflation réduite ce qui en renchérit le coût. Durant cette année le déficit risque bien de dépasser les 6 % du produit intérieur brut. Dans le même temps, la France est le seul pays d’Europe à avoir vu son taux de pauvreté augmenter entre 2015 et 2023. L’avenir est tout sauf rassurant. Un tiers des français aura plus de 65 ans en 2070 ; les dépenses publiques liées aux retraites et à la santé vont croître de façon exponentielle. La démographie marque le pas. Et que dire des besoins de financement d’une transition écologique indispensable à la survie de nos civilisations.
Ne confondons pas dette et déficit. Ce dernier est le « produit » de l’écart entre recettes et dépenses. Il représentera peut-être six points de PIB cette année. L’on a nettement le sentiment d’une perte de contrôle de celui-ci ; de quoi inquiéter les marchés financiers et les organismes de notation avec les conséquences que l’on devine. Pourtant, les dépenses publiques n’ont pas bougé depuis 2017, elles seraient même un peu moindres. Alors d’où vient l’accroissement de ce déficit structurel ? D’une part des mauvaises performances économiques dues à la conjoncture : le rendement de l’impôt a été moins bon que prévu. Et d’autre part, et surtout, du fait que depuis sept ans, Emmanuel Macron a baissé les recettes dans d’importantes proportions. Impôt sur les sociétés, impôts de production, taxe d’habitation, impôt sur la fortune, flat tax – pour ne parler que d’eux - ont été ou supprimés ou ont vu leurs taux abaissés.
Résultat : environ cinquante à soixante milliards en moins dans les caisses de l’Etat, alors que celui-ci cherche quelque chose comme cent dix milliards pour équilibrer son budget ! Monsieur Macron a vidé les caisses avec sa politique de l’offre et sa fumeuse théorie du ruissellement. A l’évidence cette politique n’a pas fonctionné (sauf au profit de certains qui n’en avaient nul besoin). Notre pays creuse l’écart par rapport aux autres, notamment européens qui, eux, parviennent à dégager des marges. Nos besoins sont partout criants. Pourtant, le gouvernement va mettre le pays à la diète, et éventuellement proposer quelques hausses d’impôts à la marge. Le remède risque d’être de peu d’efficacité, surtout avec une économie et des gains de productivité atones. Sans oublier un pays sans réelle majorité, qu’un premier ministre en sursis et sans légitimité politique essaye de diriger sous la pression d’une extrême droite en embuscade. Bon courage…
Piètre bilan après sept ans de règne. Monsieur Macron nous a habitué à des échecs répétés ; beaucoup ont ponctué cette Présidence qui ne restera pas dans les mémoires si ce n’est comme contre exemple. Par contre cet énième insuccès nous coûte très cher et plombe une fois encore une France qui n’avait nul besoin de ce nouvel avatar macronien.
Le Président pourrait s’écrier comme le caporal Diaz dans L’Oreille cassée : « Caramba, encore raté » !
Jacques LAVERGNE
L'Éditorial du 08 septembre 2024
« Le joueur de bonneteau de l’Elysée
Winston Churchill le disait « le succès c’est d’aller d’échec en échec sans perdre son enthousiasme ». Une phrase qu’Emmanuel Macron a dû faire sienne car il ne manque pas d’enthousiasme et possède une solide collection d’échecs. Néanmoins, il poursuit comme si de rien n’était sa politique, comme s’il était seul, comme si n’existaient ni parlement, ni partis politiques, ni corps électoral, ni volonté exprimée par celui-ci.
Pendant des semaines, feignant d’atermoyer, il a usé et baladé le personnel politique et les Français après une élection où son camp s’est pris une gigantesque claque. Un seul but conserver à tout prix le pouvoir et ne tirer aucun enseignement de la volonté des urnes. Jouer les uns contre les autres, diviser pour mieux régner et, après avoir organisé le chaos, paraître comme le sauveur qui va réparer les dégâts. Il y faut une bonne dose de culot et un phénoménal hubris pour manœuvrer ainsi mais le garçon ne manque ni de l’un ni de l’autre.
Ainsi après avoir joué pendant des semaines au chat et à la souris, poussé l’exaspération de tous à son maximum, il a consenti à nommer un premier ministre. Il l’a choisi dans un parti droitier, les Républicains, qui ne représente même pas 10 % des députés à l’assemblée, un parti bien mal en point et c’est un euphémisme. Alors même que les électeurs avaient assez nettement désigné la gauche pour remplir cette fonction. Autant dire que Michel Barnier ne dispose d’aucune légitimité politique. Et qu’ainsi Macron espère bien garder la main et avoir barre sur son nouveau chef de gouvernement (On lui a d’ailleurs déjà désigné son directeur de cabinet, mauvais signe !). Pas sûr que cela fonctionne toutefois ; l’avenir nous dira si M. Barnier a du caractère et de la dignité.
La gauche dans son ensemble a regardé passer le train en poussant des cris d’orfraie, en criant au vol des élections et en se faisant rouler dans la farine. Qu’elle a d’ailleurs payée comme le cocu qui règle la chambre : pitoyable stratégie orchestrée avec le brio que l’on lui connaît par le sieur Mélenchon épaulé par Faure, son valet du PS (qui a même été jusqu’à faire huer le nom de Cazeneuve, potentiel premier ministrable de gauche). Tout a été fait pour se rendre indésirable, tout en revendiquant haut et fort le pouvoir mais en faisant tout pour ne pas se le voir confier. Certains députés du Parti Socialiste oubliant au passage qu’ils ont été élus grâce au front républicain constitué face au Rassemblement National, et donc au moyen de voix d’électeurs de droite.
Le pays ressort fragilisé de cet épisode politique désastreux, avec des finances en lambeaux, des chantiers urgents au point mort ; et bien sûr une politique écologique toujours aux abonnés absents au moment où la planète flambe littéralement. Sans oublier une guerre à nos portes, et des tensions géopolitiques préoccupantes. La voix de la France continue d’être inaudible au plan international et européen. Et force est de constater (comme d’autres pays européens) des gains de productivité quasi nuls contrairement aux Etats-Unis, nous privant ainsi de marges de manœuvres financières.
Le Président Macron a une fois encore démontré qu’il n’était pas un démocrate et n’avait que bien peu de qualités pour diriger un grand pays. Mais qui l’ignorait encore ? C’est un petit manœuvrier orgueilleux et arrogant, sans envergure, sans programme ni vision pour la France qu’il a contribué à affaiblir considérablement depuis sept ans. Tout en faisant le lit de la droite extrême devenue aujourd’hui l’arbitre de la vie politique. Pas très glorieux comme résultat. Désespérer l’électeur n’aura qu’un effet : faire bondir le taux d’abstention aux prochaines consultations.
Un nouveau monde nous avait-il promis : nous avons eu l’ancien…. en pire !
Jacques LAVERGNE
L'Éditorial du 22 août 2024
«JO et après ? tout sur la table et pas de recettes»
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